Académie de Poitiers

Entretien réalisé via Appear.in le 10 avril 2019 avec Pauline Mazereau – enseignante d’anglais

Liens (généraux sur le fonctionnement du lycée) :
http://etab.ac-poitiers.fr/lyc-venise-verte-niort/
Présentation du Centre de Connaissance et de Culture – Future Classroom Lab
Centre de connaissance et culture
[idem]
Nouvelle Forme Scolaire dans les filières STL et ST2S
Bulletin d’information numérique ; paraît chaque semaine à la VV, avec une question numérique.

Liens (pratiques pédagogiques – Pauline Mazereau) :

https://view.genial.ly/5c797ef95d0e4e575e223f8a
https://drive.google.com/file/d/1ZeyzP-uTI23BKZybzeeNPS1JdvdIEUX2/view

 

Informations générales

Situé à Niort, préfecture des Deux-Sèvres, le lycée de la Venise Verte est un établissement d’enseignement général et technologique. Il accueille également cinq sections préparant au BTS ainsi que deux classes préparatoires aux Grandes Écoles (CPGE). L’effectif accueilli est d’environ 1400 élèves (dont près de 400 en filières post-bac).

A la rentrée 2018, le lycée a inauguré un Centre de Connaissances et de Culture (3C) labellisé Future Classroom Lab dans les locaux de l’ancien CDI (cf. liens).

5 RUPN (Référents pour les Usages Pédagogiques du Numériques) contribuent à la diffusion des pratiques innovantes en matière de numérique éducatif. Des temps formels sont consacrés aux échanges à ce sujet (une permanence hebdomadaire sur la pause méridienne) mais l’équipe souligne qu’une partie des échanges se fait de façon plus informelle, à la demande et selon les besoins.

L’établissement a mis en place une approche raisonnée du BYOD, régi par une charte spécifique à l’établissement. L’idée centrale est de réfléchir les adaptations pédagogiques et les nouvelles opportunités offertes par le 3C ou le Byod avec un credo : rendre les élèves davantage acteurs de la construction de leurs connaissances et compétences.

L’établissement a acquis une licence Gsuite Education, compatible avec la RGPD.

 

Pratiques pédagogiques

Professeure d’anglais au Lycée la Venise Verte et référente numérique, Pauline Mazereau s’est progressivement mise au numérique éducatif, il y a plusieurs années, dès 2010. Les innovations qu’elle a pu mettre en place sont toutes parties de besoins pédagogiques précis (mise à disposition de contenus pour les élèves, passage à une fiche d’évaluation individualisée etc.) ou d’une volonté plus générale de réagencer le fonctionnement de sa classe (difficultés rencontrées avec telle classe dans la gestion de classe au quotidien). Cependant, ces innovations sont autant d’essais, qui ont fonctionné ou non et sont sujet à évolution bien évidemment, tantôt facilitateurs, ils restent gourmands en temps de travail.

Aujourd’hui, elle travaille principalement avec un TripMate (depuis septembre 2016), avec les Smartphones (et les écouteurs) des élèves (l’établissement dispose d’une charte BYOD) et, dans une moindre mesure, avec les TBI présents dans les salles de classe. Bien que le lycée soit doté de valises « baLibom », elle ne les utilise pas, cela n’est pas pratique : il faut transporter la valise, plutôt lourde, et les hubs USB peuvent rencontrer des dysfonctionnements. Elle préfère plutôt travailler avec les Smartphones des élèves : les écrans sont plus grands, les appareils globalement plus performants (dans les classes de lycée, il est rare que soit utilisé les ordinateurs des élèves, à part quelques autorisations ponctuelles pour des prises de note ; en BTS, c’est plus courant). Par ailleurs, elle n’a pas encore vraiment exploitée les « potentialités pédagogiques » du 3C, nouvellement ouvert, ayant déjà mécanisés ces dernières années certains dispositifs novateurs, que la salle de classe « ordinaire » lui permet de déployer.

Le TripMate est une borne qui permet aux élèves d’accéder à différents types de contenus (audio, vidéo) et de déposer d’autres documents en retour, des enregistrements par exemple (c’est un réseau Wifi indépendant). Comme elle le dit, il s’agit véritablement d’un « labo de langues » à part entière, dont elle peut disposer en permanence. Les élèves peuvent ainsi accéder aux contenus, les travailler et les déposer ensuite en se connectant depuis leur Smartphone, outil souvent mobilisé par la professeure. Le TBI, enfin, est moins utilisé mais reste tout de même important pour certains moments de cours (moments plus frontaux) : brainstorming général, rappeler certaines consignes ou laisser des traces écrites enrichies après avoir travaillé les documents (cartes mentales, sketchnotes, numériques ou non).

P. Mazereau a également repensé la configuration de sa classe et son rapport aux élèves. Elle passe souvent de la classe autobus à un fonctionnement en îlots et inversement. Elle amène les élèves à travailler ensemble, généralement par groupe de quatre élèves.

Depuis qu’elle a adopté ces outils et cette alternance classe en îlots/classe frontale, P. Mazereau considère qu’elle se sent « plus disponible, moins fatiguée, plus utile, moins seule », tandis qu’elle observe que les élèves sont « plus acteurs », que « beaucoup apprécient » ces dispositifs, « aiment s’entraider » et « sont moins agités » (source Genially de P. Mazereau).
Elle a actuellement des classes de première, de terminal et de BTS SIO.

 

Rapports à la connaissance

  • L’utilisation du BYOD permet à chacun d’aller à son rythme, selon ses propres capacités (plus d’autonomie) : ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a pas des objectifs en termes de connaissances, comme la professeure le rappelle, il y a des examens à la clé. Elle fonctionne aussi avec des plans de travail et distribue aux élèves des dossiers à travailler (papier et PDF avec des QR codes pour les ressources, par exemple): cela lui permet de pallier en partie à l’hétérogénéité des niveaux. Chacun, en groupe, peut travailler différents documents mis à disposition et choisir de les aborder dans l’ordre souhaité (l’accès à certains contenus peut se faire en dehors de la classe, au moyen de QR codes notamment) : l’enjeu pour l’élève est de valider la compréhension des documents, marqués par un tampon sur une feuille individuelle de validation des étapes. Elle va aider les élèves bien évidemment selon les demandes, plus « libérées » qu’en classe autobus. Des résumés et cartes mentales (appréciées des élèves, mises en ligne), selon les besoins, sont faits pour synthétiser les documents et refermer les chapitres (des polycopiés sont plus fréquemment distribués aux filières technologiques car elles ont moins d’heures d’enseignement).
  • Utilisation de Quizlet pour tester certaines connaissances, notamment concernant du vocabulaire. Les Quizlet peuvent être faits à différents moments : en amont d’un cours, pendant, après, chez soi. Assez ludique/compétitif, possibilité de jouer en équipe avec un système de scores et de podiums.
  • Le travail en îlots ne résout pas le problème de la langue de communication entre les élèves : en tant que professeure d’anglais, elle déplore tout de même qu’en îlots, les élèves parlent plutôt en français entre eux. En cours magistral, généralement seuls quelques élèves prennent la parole en anglais, souvent les mêmes. Le problème de l’insuffisance globale de l’expression orale en langue anglais se poursuit donc lors de la classe en mode îlots.
  • Elle remarque que les dispositions et les compétences à l’égard de la maîtrise de l’anglais sont déjà fixées en quelque sorte avant d’entrer en cours d’anglais. Aujourd’hui, avec la mise à disposition massive de séries ou de vidéos en VO (YouTube, plateformes comme Netflix) ou le développement de l’industrie des jeux-vidéo, certains élèves ont développé de très bons niveaux d’anglais, indépendamment de leur investissement en classe (visionnage de séries, lectures en anglais etc.). Elle observe donc de plus grands écarts entre les niveaux qu’auparavant, dus à cette démocratisation de l’accès à la langue anglaise par le numérique, même s’ils restent sûrement en partie déterminés par les milieux socioculturels des élèves.
  • En îlots, les élèves ont tendance à plus oser poser des questions. Peut-être s’instaure-t-il un rapport moins « imposant », vertical, avec l’enseignante, plutôt perçue comme accompagnante/guide, comme cela a été relevé dans d’autres expériences.
  • Il faut savoir passer d’une configuration de salle à une autre, de l’autobus à une configuration en îlots : « il faut varier », « ça fait du bien de revenir en frontal », affirme-t-elle.
  • La scolarisation d’un outil peut demander un peu de temps (15 jours, par exemple), même si globalement les élèves, note-t-elle, semblent plus à l’aise avec la maîtrise de l’outil (en l’occurrence leur Smartphone).
  • Elle fait des retours personnalisés suite à des évaluations : retour par mail via la boîte mails des élèves (G Suite Education), un fichier MP3 avec des commentaires (les plus et les moins) et des reprises de prononciation de mots par exemple (source : Genially de P. Mazereau).
  • Mise à disposition d’un site Internet créé par P. Mazereau : capsules vidéo, contenus écrits sur des points de grammaire, de méthodologie etc. (source : Genially de P. Mazereau).

 

Rapports à l’espace et au temps

  • En étant plus mobile, P. Mazereau a le sentiment d’être beaucoup moins devant son tableau et donc plus près des élèves, plus disponible pour circuler selon les besoins et pouvoir répondre aux demandes de tel groupe ou de tel élève (cas de la classe en mode îlots). Elle considère que sa « place n’est plus au niveau du tableau mais partout ».
  • Des enregistrements audio peuvent être faits dans la classe assez librement : chaque élève peut aller se trouver un petit endroit pour s’enregistrer, sous la table etc.

 

Rapports à soi et aux autres

  • Echanges par mails de temps en temps avec des élèves, via G Suite/Pronote (?).
  • « La classe inversée c’est passé de face à face à côte à côte » : plus agréable, les élèves osent davantage poser des questions, cela est moins fatiguant pour la voix également. Confort de travail, proximité avec les élèves (individualisation de la relation pédagogique).
  • Gestion de classe facilitée en îlots, les élèves sont moins dans la représentation. Cette configuration de classe a même été une solution salvatrice quand elle a rencontré de sérieuses difficultés en matière de gestion de classe il y a quelques années.
  • Idée du professeur comme guide, plus disponible pour les besoins des groupes/élèves.

 

Autre

En demandant à ses élèves si les pratiques pédagogiques qu’elle met en place leur conviennent, elle note que globalement ils apprécient travailler en groupe mais que ça n’enlève pas l’appréhension de se retrouver seul-e face à sa copie les jours d’examen. Les Quizlet et les cartes mentales ont beaucoup de succès. Les ardoises sur lesquelles on inscrit des réponses lors d’exercices remportent l’adhésion des élèves, devant des dispositifs comme les Kahoot ou les clickers : ludiques, ils leur rappellent aussi leur enfance et leur permettent de faire des petits ajouts (dessins etc.) en plus des réponses à fournir.

L’établissement est passé sous licence GSuite Education depuis le mois de septembre 2018.

Dans l’équipe pédagogique, les collègues moins aguerris vont tout de même en salle informatique. La volonté de changement sur tout ce qui est travail collaboratif, posture enseignante, est très variable selon les disciplines et globalement plus rare. Il y a des personnes plus réticentes, qui peuvent se sentir dépassées par les outils numériques. Sentiment d’être peut-être pas si bon que cela. Selon P. Mazereau, cela n’est pas dû à un effet générationnel. Lettres et philo, peut-être moins axées numérique éducatif tout de même.

Pauline Mazereau s’est beaucoup formée par elle-même, au gré des besoins pédagogiques rencontrés. Elle mobilise également beaucoup Twitter pour s’inspirer des initiatives portées par des collègues, souvent en poste dans d’autres régions. Elle suit leur actualité et est attentive à leurs photos d’un document pédagogique, ce qu’ils ont innové en classe. Source d’inspiration, Twitter reste selon elle un « outil de veille », un « outil professionnel ».

Parfois P. Mazereau utilise le réseau Wifi du TripMate pour travailler avec les élèves : il faut en effet compenser la connexion Wifi du lycée qui n’est pas toujours stable, tout le temps. Sinon, il arrive que les élèves utilisent leur connexion personnelle. Mais la borne TripMate reste essentiellement utilisée pour le partage de documents.


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