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Entretien réalisé dans l’établissement le 6 mai 2019 avec Mme Florence RAFFIN, enseignante de physique-chimie – fondatrice de la #teamphysbressuire
Liens :
Fiche Expérithèque : https://eduscol.education.fr/experitheque/fiches/fiche12498.pdf
Site personnel de Florence Raffin : https://sciencesgenevoix.jimdo.com/
Situé à Bressuire, sous-préfecture du département des Deux-Sèvres (un peu moins de 20 000 habitants), le lycée Maurice Genevoix fait partie de la Cité Scolaire Genevoix-Signoret-Vinci. Maurice Genevoix, lycée général et technologique, accueille un peu plus de 1200 élèves répartis entre les trois filières générales, 2 filières technologiques (ST2S et STMG) et 2 BTS (Gestion de la PME et Comptabilité Gestion). L’équipe pédagogique est composée d’une cinquantaine d’enseignants.
Il n’y a pas de projet spécifique en lien avec le numérique au sein de l’établissement.
L’expérience présentée ici est née de l’initiative individuelle de Mme RAFFIN, qui a progressivement fédéré les 7 enseignant.e.s de physique-chimie du lycée (4 femmes, 3 hommes âgés de 35 à 55 ans).
En 2014, Mme Raffin entend le terme de Classe Inversée prononcé par un inspecteur. Spontanément, elle s’est montrée assez sceptique sur le procédé : « cours à la maison et devoirs en classe, je me suis dit mais c’est n’importe quoi, c’est complètement incongru ».
En faisant quelques recherches, elle trouve des expériences intéressantes aux Etats-Unis et au Québec et y voit une opportunité de réduire voire supprimer le temps très long de prise de notes et de recopie de corrections d’exercices sur les temps en classe.
Elle découvre également le travail de Soledad Garnier en école primaire qui lui fait dire : « Comment ça se fait que des gamins de 10 ans, ils sont aussi autonomes dans une classe, avec des petits îlots comme on a maintenant, alors que quand ils ont 15 ans, ils n’ont plus le droit de se lever ? ».
En 2014, la principale crainte de Mme Raffin en lien avec la mise en œuvre de son projet de classe inversée concernait l’accès à internet des élèves chez eux. Quelques rares élèves ne disposaient pas encore d’une connexion internet illimitée.
La difficulté réside davantage au niveau de l’établissement pour les internes avec une connexion internet encore loin d’être optimum.
Depuis quelques mois, des bornes wifi ont été installées dans l’établissement mais elles n’offrent pas une couverture ni un débit suffisants. De plus, les élèves ne peuvent s’y connecter qu’avec des outils de l’établissement.
Après une phase d’expérimentation en mai 2014 auprès de ses élèves de seconde et de 1ère S et une période estivale studieuse, Mme Raffin a inversé ses 3 niveaux à la rentrée 2014. Au bout d’une année d’expérimentation (“je ne savais pas si j’allais tenir sur la longueur”), Mme Raffin a présenté son travail à ses collègues, la pédagogie mais aussi la dimension technologique.
A la rentrée 2015, tous les enseignants de physique ont inversé leurs 25 classes.
Les outils utilisés pour la mise en œuvre de la classe inversée sont assez intuitifs mais nécessitent quand même un peu de formation. Mme Raffin travaille le plus souvent en autoformation (via des tutoriels notamment).
Le profil des enseignants concernés sont assez divers mais tous ont créé une chaîne youtube et 6 ont un site internet dédié. En revanche, 2 “ne sont pas geek du tout” (ils ne possèdent pas de smartphone par exemple).
3 sont très actifs sur twitter et les 4 autres plus ou moins.
Concernant la formation, Mme Raffin a un slogan : “Google est mon ami”. Lorsqu’elle ressent un besoin, elle va chercher en se disant que probablement d’autres avant elle se sont posés les mêmes questions. En tant que formatrice “classe inversée” elle souligne que cette absence de réflexe d’aller chercher par eux mêmes sur google est un gros problème chez beaucoup de ses collègues. “Si on ne leur donne pas la main pour les accompagner, ils ne vont pas y aller”.
Au début, Mme Raffin a testé cette nouvelle méthode pédagogique sans en référer au proviseur ni à ses collègues des autres disciplines. Très vite, ils ont fait le constat “qu’il ne fallait pas trop la ramener”. L’interprétation qu’elle en fait est que les enseignants craignent d’être contraints à quitter leur zone de confort.
Du côté des parents, aucun retour n’a été porté à la connaissance de Mme Raffin, ni positif, ni négatif. Il est indispensable d’expliquer la démarche et que ce que les élèves voient à la maison sera travaillé en cours. Elle note cependant quelques phases de conflits mineurs avec des élèves qui ont toujours été en réussite au collège et à qui on demande en seconde de travailler en classe et collectivement. Elle note chez certains élèves une phase de déstabilisation, d’autant plus s’ils sont en échec en seconde pour d’autres raisons.
Au sein de l’établissement, ce qui se fait dans le cadre des cours de physique est peu partagé. Chaque année, les enseignants de physique participent à la semaine de la Classe Inversée (#CLISE). Ils ouvrent leur classe pour permettre à des collègues de venir observer ce qui s’y déroule. A cette occasion, ils reçoivent la visite de beaucoup de collègues de l’extérieur (professeurs des écoles, de BTS, et même des enseignants vendéens) mais aucun collègue de l’établissement.
Toute la démarche est expliquée dans cette fiche expérithèque : https://eduscol.education.fr/experitheque/fiches/fiche12498.pdf
Florence Raffin a mis en place des outils pour encourager la collaboration. Les élèves disposent par exemple d’un Tétra’aide (outil conçu par Bruce DEMAUGE-BOST, Ecole Federico Garcia Lorca – Vaulx-en-Velin) qui permet de gérer les demande d’aide. Ainsi, ils n’ont le droit d’appeler l’enseignante que s’il y a consensus au sein du groupe, s’ils n’ont pas trouvé la solution.
Source : https://aufildesmaths.fr/dans-les-coulisses-dune-classe-inversee-episode-11-special-tetra-aide.html
Cet outil apporte également une aide précieuse pour pouvoir gérer, simultanément, 9 groupes qui ne réalisent pas les mêmes activités au même moment.
Cette question de la gestion de classe constituait la plus grosse crainte de Florence Raffin au début. La clé, selon elle, est de faire en sorte que les élèves soient toujours en activité, disposent des corrections pour ne pas attendre que l’enseignante soit disponible. Florence Raffin active une sonnette lorsqu’il y a trop de bruit afin de ramener les élèves au chuchotement.
Les outils numériques :
Pour la réalisation des cartes mentales, Florence Raffin et ses collègues ont testé les deux formats : numérique et papier ou tableau blanc. Ils font le constat unanime que le papier ou tableau est plus efficace. L’outil numérique fait perdre du temps et détourne de l’objectif.
Les 7 enseignants de physique avaient l’habitude de travailler en équipe, autour de projet (“C’est pas grâce au numérique qu’on a travaillé en équipe”). Mais une des raisons pour lesquelles l’expérience de classe inversée fonctionne, selon Mme Raffin, c’est parce que tout le monde fait la même chose… sans faire la même chose. Chacun s’approprie le dispositif à sa façon. Personne ne prend le matériel (document, vidéo) et considère que le travail est tout fait. Au début de l’expérience, ils se sont interrogés sur le partage des capsules vidéos et la possibilité d’utiliser des capsules réalisées par un autre collègue. Mais ils ont considéré qu’il était important que chacun fasse ses propres capsules car l’élève est très attaché à ce que ce soit son enseignant.e qui explique les concepts à travailler en dehors la classe. C’est un lien à construire et à entretenir avec les élèves. Il est important que chaque enseignant dispose de ses propres outils qui sont une continuité de ce qui se fait dans l’espace et le temps de la classe.
La classe inversée permet de sortir du schéma classique émetteur-récepteur avec un enseignant qui transmet et des élèves qui écoutent (ou pas) et recopient. “On est tous capable de recopier quelque chose au tableau en posant son cerveau à côté et sans rien y comprendre”. “Moi maintenant, je me sens vraiment utile”.
La contrepartie est une charge de travail beaucoup plus lourde, et même doublée les premières années : créer les capsules, le plan de travail, faire les questionnaires, gérer les corrections. “On y a passé nos vacances”.
La classe a été organisée en 9 îlots de 4 élèves. Des tableaux blancs ont été répartis sur les murs et les fenêtres afin de favoriser des productions collaboratives.
Des inspecteurs venus voir fonctionner la classe de Mme Raffin ont fait le constat que les élèves prenaient plaisir à être en classe. Même si certains sont en difficulté, ils ont toujours quelque chose à faire, ils sont toujours actifs. Et il y a toujours quelqu’un pour les aider car ils sont bienveillants entre eux.
Florence Raffin souligne également qu’avant la mise en oeuvre de la classe inversée, ils n’avaient pas le droit d’échanger avec leurs voisins lors des phases de résolution d’exercices. Maintenant, il leur est demandé de parler entre eux, “ça change beaucoup de choses”.
Elle note également que les interactions professeur/élèves ont beaucoup évolué. Elle arrive désormais à échanger avec tous ses élèves au cours d’une même séance.
Concernant les relations intra-groupes, Florence Raffin a fait le choix de les laisser constituer les groupes eux mêmes, par affinités. “Je préfère travailler avec des collègues avec lesquels je m’entends bien”. Un de ses collègues a utilisé les sociogrammes : chaque élève indique une personne avec qui elle veut travailler, une personne avec qui elle ne veut pas travailler. Cela permet notamment de repérer rapidement celle.celui qui est isolé.e dans la classe.
Pour chacune de ses classes, Florence Raffin produit un plan de travail indiquant les ressources à consulter, les exercices et activités, les défis à réaliser tout au long de la séquence (plusieurs semaines). La compréhension et la mémorisation des notions s’effectuent en classe. A chaque cours, les élèves ont à réaliser une carte mentale collective (par groupe de 4) qu’ils prennent en photo et recopient chez eux. “Je ne veux pas qu’ils perdent du temps à recopier en classe”.
La demande adressée aux élèves porte la plupart du temps sur de la consultation. Lorsqu’il leur est demandé de créer, leurs compétences numériques sont souvent insuffisantes. Les compétences numériques ne viennent pas spontanément aux élèves, il faut passer par une phase d’apprentissage. Pour que ça fonctionne, il faut des outils dont la prise en main est très rapide. Par exemple, en classe de seconde, les élèves créent eux mêmes quelques capsules vidéos avec Adobe Spark.